2018

Lignes d’ombre

La difficulté ne consiste pas pour l’artiste à pouvoir saisir quelque chose mais à rester disponible dans le dessaisissement. Une vision (plus ou moins) non intentionnelle ne signifie pas une passivité, mais une manière d’être en communication avec le monde sans volonté de puissance. /// Catherine GROUT, L’émotion du paysage

le projet

Ombres, lignes, pins

Ce travail est le fruit d’une résidence d’artiste effectuée à Haslla Art World Museum à proximité de la ville côtière de Gangneug-Si, en Corée du Sud. Dressé devant mon regard se trouve un mur de pins. La masse verte griffée de lignes rouges, forme des ondulations qui s’élèvent à l’horizon. Quel horizon d’ailleurs, tant les collines ravinées sont proches, si proches ? Me retourner ne m’apporte pas plus de sérénité. A la verticalité des pins s’oppose un autre mur, tantôt formé de la brume marine, tantôt barré d’un horizon à peine courbe, séparant la mer de Corée et un ciel dont l’intensité du bleu m’aspire.

Je ne suis pas en tension entre deux états, mais bien en tension entre deux forces qui constituent cet environnement puissant. Habituée à me fondre dans le paysage, à en faire mon espace intime, cet entre-monde terrestre et marin m’a d’abord résisté ; je ne parvenais pas à l’appréhender, tourmentée que j’étais par la vibrante énergie tellurique de l’un comme par l’énergie ondoyante de l’autre.  Il m’étouffait sans doute aussi. L’immense forêt de pins a pourtant rapidement  supplanté l’océan, situé du côté opposé de l’atelier qui m’était assigné et qui m’attirait pourtant au commencement.

 

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Finalement, c’est par le biais des ombres des pins que j’ai compris où devait se porter mon regard. Jour après jour, j’ai saisi comment les ombres s’animaient. J’ai réalisé comment la forêt vivait et respirait au gré du temps, son intime vibrance. Durant un mois et demi, heures après heures, minutes après minutes, secondes après secondes, j’ai transcrit ces lignes des ombres, sous un soleil de plomb, dans des positions inconfortables, inlassablement, patiemment. Je suis devenue une chasseuse d’ombres. J’ai pesté contre les nuages, le mauvais temps parfois, le vent qui soufflait dans les branches et qui m’empêchait à certains moments de transcrire les ombres sur le support.  J’y suis revenue sans cesse, de façon obstinée. Au fur et à mesure de mes interventions, le temps s’est inscrit là, sous les lignes du crayon dans la matière de la peinture…

Cette résidence a fait l’objet d’un livre d’artiste du même titre.

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Les œuvres

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Artiste plasticienne

Anne-Laure H-Blanc